Viennale 2010 – #1

Embarquement

28 octobre, Roissy 16 h 22.

John Turturro, qui vient à Vienne pour présenter son quatrième film Passione, est dans la file d’attente du terminal 2D. Il ne reste qu’un soir en Autriche ; c’est peut-être la seul occasion d’échanger un mot avec lui, il faut en profiter. Lorsque j’arrive dans la salle d’embarquement, l’acteur a disparu. Quelque peu déçu, je replonge dans le livre de Tony Williams sur le cinéaste américain à l’honneur à Vienne cette année : Larry Cohen. Une demi-heure plus tard, Turturro trône devant le comptoir de la porte 56. Est-ce qu’un entretien ce soir, après la projection de Passione, est possible ? « Non, mais vous pouvez poser vos questions maintenant ». Les voyageurs se pressent pour entrer dans l’avion ; Turturro parle de son film. Très pro, il récite en substance ce qu’il a écrit pour le catalogue : Passione est une exploration de Naples à travers la musique. C’est un documentaire sur l’immense « juke-box » qu’est cette ville, mais surtout un film d’aventures (a musical adventure). Qu’est-ce il pense de Napoli, Napoli d’Abel Ferrara ? « L’intérêt des italo-américains pour Naples vient peut-être du fait qu’elle ressemble au New-York des années 70. » Sur ce, les appels par numéros de siège se font entendre, l’entretien se clôt prématurément.

Dans l’avion. Cogitations pré-festivalières.

Cinéastes, programmateurs, critiques viennent en grand nombre à la Viennale, ne serait-ce que pour deux ou trois jours, afin de présenter des films, en découvrir de nouveaux, rencontrer des gens. La circulation incessante qui en résulte confère à la manifestation un rythme trépidant. Toutefois l’ampleur et la longueur de ce festival qui dure treize jours contrebalance ce tempo. Le bouche-à-oreille entre spectateurs ne marche pas que ponctuellement, il fonctionne aussi sur des durées très longues : « Tu devrais voir celui-là, il repasse le 1er ». D’autant plus qu’à Vienne, l’absence de compétition favorise des échanges et des discussions plus ouvertes sur les films. L’opposition entre les programmations parallèles et la sélection disparaît. Le projet que l’on pourrait qualifier de « cinéphile » de la Viennale est de montrer des bons films : du passé, par le biais d’hommages et de rétrospectives, et d’aujourd’hui en choisissant les objets les plus intéressants de cette année 2010. Quatre hommages sont rendus cette année : à Éric Rohmer tout d’abord, sous la forme d’une rétrospective, mais également au chef opérateur William Lubtchansky décédé le 4 mai dernier. Douze films sur lesquels il a collaboré sont présentés, parmi lesquels Amerika rapports de classe, Trop tôt, trop tard des Straub, Merry-go-round et Secret défense de Rivette, Le petit criminel de Doillon ou encore France/ tour/ détour de Godard. Sont également mis à l’honneur le cinéaste canadien Denis Côté dont tous les longs sont montrés ainsi que Larry Cohen, cinéaste américain indépendant des années 70, surtout connu en France pour la série Les envahisseurs et pour son film Le monstre est vivant dans lequel un bébé monstrueux sème la terreur dans une ville.

Et il y a bien sûr l’immense sélection qu’il est un peu tôt pour réellement décrire. Certes, comme la plupart des films ont déjà été montrés dans d’autres festivals certains sont connus comme Winter vacation de Li Hongqi, Cold weather de Aaron Katz, Putty Hill de Matthew Porterfield, The Dubai in me de Christian Von Borries, Julien de Gaël Lépingle. Pour les autres, soit le nom saute aux yeux et fait immédiatement envie : Manoel de Oliveira O estranho caso e Angélica) Jia Zhangke (Shanghai zhuan qi), Jean-Claude Rousseau ( Festival) ou encore John Gianvito ( Vapor Trail (Clark)), soit il faut avancer à tâtons en laissant traîner son oreille. Mes détecteurs m’ont déjà indiquer Im schatten de Thomas Arslan et Foreign parts de Verena Paraval et J.P Sniadecki. En un premier temps, on se concetrera sur Larry Cohen et Denis Côté, des entretiens sont prévus avec eux.

par Felix Rehm
jeudi 28 octobre 2010