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Cinéma du Réel 2013

Déviation

Deportado, de Nathalie Mansoux, (2012, France, Portugal, 1h07) + Tchoupitoulas, de Bill & Turner Ross (2012, États-Unis, 1h22mn)

Lundi après-midi au Centre Pompidou, on trouve porte close à la séance, complète, d’Ô Heureux Jours de Dominique Cabrera. On dispose donc d’un peu de temps. Celui par exemple, de se laisser envahir par Dreamhouse (2009), installation unique et inquiétante, visible au Forum -1 du Centre, de feu Stephen Dwoskin, à qui est ici consacré une rétrospective, en collaboration avec Antoine Barraud. Les images proposent un jeu de regard où des femmes posent et se meuvent entre leur chambre, l’escalier et le salon, et exhibent une curieuse danse domestique dans une boucle projetée sur trois murs.

Le hasard nous conduit à la séance de Deportado de Nathalie Mansoux. Retour à la réalité du documentaire le plus scolaire, les dix premières minutes suffisent pour s’en rendre compte : panorama d’un paysage américain suivi par une interview d’un représentant de la loi migratoire qui introduit les témoignages des déportés. La rhétorique rebattue empêche d’emblée de s’intéresser davantage à l’objet. Elle se déroule paresseusement jusqu’à cinq dernières minutes qui sortent, enfin, du système de la voix off illustrant des vies brisées, sur les bords d’une île des Açores où les exclus aux corps usés se prélassent un moment sur la plage.

Regain d’enthousiasme devant Tchoupitoulas des frères Ross & Bill Turner. Un soir, les trois jeunes frères Sanders (William, Bryan, Kentrell, et leur chien Buttercup) arrivent trop tard au moment de monter à bord du dernier ferry censé les raccompagner chez eux. Attachants, les jeunes bavards rappellent les personnages de Treme de David Simon, ou ceux des Bêtes du Sud Sauvage dont le réalisateur Benh Zeitlin est cité aux remerciements. L’incident prend l’ampleur d’une odyssée, plongée dans la nuit de la Nouvelle-Orléans du jazz, des strip-clubs et des bars. Inoubliable, l’aventure l’est moins pour les trois gamins que pour nous, prétexte de digression d’une caméra flâneuse s’attardant sur un marchand d’huître gouailleur, un accordéoniste déguisé en clown, une danseuse imitant Joséphine Baker.

par Thomas Fioretti
mardi 26 mars 2013